COMMUNIQUÉ DU COLLECTIF DES FAMILLES UNIES SUR LES CONDAMNATIONS À MORT DE RESSORTISSANTS FRANÇAIS EN IRAK

Trois ressortissants français ont été condamnés à mort par pendaison le dimanche 26 mai à Bagdad, en Irak. Un quatrième français a été condamné à mort le lendemain, deux autres le 28 mai.

Les procès ont eu lieu sans que les prévenus puissent avoir accès à leur avocat français, sans journaliste présent. L’avocat commis d’office par la justice irakienne n’a pas eu accès au dossier à l’avance, et n’a pas pu rencontrer ses clients. Les audiences n’ont pas duré plus d’un quart d’heure. L’avocat français d’un des prévenus avait reçu quelques jours auparavant l’assurance du Quai d’Orsay de favoriser son voyage à Bagdad pour avoir accès à la défense de son client. Il n’a pas pu se rendre sur place à temps, et de fait la défense de son client lui a été interdite.

Le Collectif des Familles unies condamne fermement ces parodies de justice, qui ne respectent aucune des règles du procès équitable : procédures expéditives, aucun accès au dossier pour les avocats ni possibilité de visiter les prévenus, aucun droit accordé à la défense, procès expédiés en un quart d’heure.

Les douze français qui passent en procès actuellement ont été transférés de Syrie en Irak à la mi-février. Tous ont été fait prisonniers en Syrie, et étaient incarcérés en Syrie depuis plusieurs mois. Leur transfert en Irak n’a pas pu se faire sans l’assentiment des autorités françaises : de ce fait les autorités françaises ont livré des ressortissants français à un pays pratiquant la peine de mort et où le droit à un procès équitable n’est pas respecté, alors que la France a ratifié de nombreux traités internationaux de protection des droits de l’Homme, dont certains l’engagent à promouvoir l’abolition de la peine de mort. La résolution 2396 adoptée par le Conseil de Sécurité de l’ONU (décembre 2017) appelle les Etats à « veiller à ce que toute mesure prise pour lutter contre le terrorisme soit conforme à toutes leurs obligations au titre du droit international, en particulier le droit international  des droits de l’Homme. » En livrant des français à la mort, les autorités françaises vont à l’encontre de tous les principes qui régissent notre droit et le droit international.

Le Collectif des Familles Unies rappelle que la peine de mort est une abomination, qui n’existe plus dans notre pays depuis près de quarante ans, et que l’Union Européenne a bannie. Nous appelons solennellement le gouvernement français à tout faire pour arrêter ce funeste enchaînement de condamnations à mort, inédit dans notre histoire récente, même si l’on considère que c’est la décision d’autoriser ces transferts qui provoque cette situation qui met la France en contradiction avec ses principes abolitionnistes. Nous appelons le gouvernement français à bloquer toute velléité de nouveaux transferts de ressortissants français vers l’Irak.

L’un des arguments souvent employé pour justifier des procès « sur place » est qu’ils permettraient de connaître la vérité sur les exactions commises par l’Etat Islamique et de faire valoir le droit des victimes : force est de constater qu’aucune vérité ne sort de ces procès sans témoins expédiés à la va-vite, où même les actes d’accusation ne sont pas rendus publics, où aucune preuve n’est produite, où aucun témoin ne comparaît, où les aveux peuvent avoir été extorqués sous la torture, et où les droits de la défense sont inexistants. Seuls des procès équitables, respectant les normes internationales et européennes,  permettront de faire la lumière sur les crimes de l’Etat Islamique, et de prononcer des peines individualisées à l’encontre des personnes accusées. Les procès en Irak viennent de montrer leur vrai visage, malheureusement cautionné par nos autorités : non seulement ils sont des parodies de justice, contraires à tous nos principes de droit, mais ils nous plongent dans l’horreur d’un retour de la peine de mort. Pour le droit de connaître la vérité, pour le respect de nos principes, nous demandons au gouvernement français d’empêcher ce sinistre scénario d’exécutions capitales, et de juger les ressortissants français sur notre sol.

Le 28 mai 2019.

Les familles du  « Collectif des Familles Unies »

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