20 novembre 2019 : Journée mondiale de l’enfance 30e & anniversaire de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant (CIDE)

LETTRE OUVERTE DU COLLECTIF DES FAMILLES UNIES AU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE

Monsieur le Président,

300 enfants français sont prisonniers dans des camps en Syrie : que fait la France ?

Au moment où nous célébrons la Journée mondiale de l’enfance, au moment où notre pays et les pays européens fêtent le trentième anniversaire de l’adoption de la Convention internationale des droits de l’enfant, des centaines d’enfants européens, et parmi eux 300 enfants français, sont prisonniers dans les camps de Al Hol et de Roj, dans le nord-est de la Syrie, depuis des mois pour certains, et depuis des années pour d’autres. La grande majorité de ces enfants a moins de six ans.

La France et les autres pays européens, tous signataires de la « Convention Internationale des Droits de l’Enfant » (CIDE), se sont engagés avec force dans la défense des droits des mineurs.

Les enfants français prisonniers en Syrie survivent difficilement en zone de guerre dans des conditions épouvantables, sans protection, en proie à toutes sortes de maladies, sans soins adaptés, malnutris et déshydratés. Leurs traumatismes et leurs blessures, physiques ou psychiques, ne sont pas traités. Ils n’ont accès ni à l’école ni aux loisirs, et demeurent enfermés dans un univers clos et étouffant, sans perspective et sans avenir. 

Pourtant, la France et les pays signataires se sont engagés à garantir le droit des enfants à la vie et au développement, à la santé, à l’éducation, à l’identité. La France et les pays signataires se sont engagés à garantir le droit des enfants à être protégés contre toutes formes de violence, à ne pas être détenus arbitrairement, à ne pas subir des traitements inhumains et dégradants. La France et les pays signataires se sont engagés à garantir le droit des enfants à être protégés contre toutes formes de discrimination ou de sanction motivées par les activités de leurs parents.

Les 300 enfants français prisonniers dans les camps en Syrie sont privés de tous ces droits, et les autorités françaises sont parfaitement informées de la situation dramatique dans laquelle ils se trouvent. L’UNICEF et la Croix-Rouge, les différents comités des droits humains et des droits de l’enfant des Nations Unies et du Conseil de l’Europe, la « Commission Nationale Consultative des Droits de l’homme » ([CNCDH], le Défenseur des Droits, et plus récemment le Secrétaire Général des Nations Unies, ont exhorté les différents pays à rapatrier leurs ressortissants, à rapatrier les enfants et leurs mères.

La France et l’Europe font la sourde oreille. Non seulement notre pays manifeste une totale inertie pour aider ces enfants innocents, mais il les maintient volontairement en détention et donc en danger en refusant de les rapatrier. Les forces kurdes, qui gardent encore les camps [mais jusqu’à quand ? la France va-t-elle laisser Bachar Al Assad récupérer nos enfants ?], appellent depuis des mois les différents pays étrangers à rapatrier leurs ressortissants, et tout particulièrement les enfants.

Si un groupe d’enfants français était coincé dans une crevasse au fin fond de l’Himalaya, la France mobiliserait tous ses moyens pour les secourir. Que valent toutes les conventions de protection de l’enfance et des droits des enfants, si l’on peut opérer une discrimination insupportable entre des enfants, si l’on peut décider de sauver certains et de laisser mourir d’autres, en leur faisant payer les fautes commises par leurs parents ? 

Comment un pays comme la France, qui a toujours soutenu et diffusé dans le monde tous les principes de la protection de l’enfance, peut-il rester indifférent au sort de ces enfants français malades, épuisés, traumatisés, blessés, qui survivent depuis des mois derrière les grilles et les barbelés des camps syriens ? Pire encore : comment un pays signataire de toutes les Conventions sur les droits de l’enfant peut-il maintenir arbitrairement en détention, dans une espèce de sous-traitance abjecte, des centaines d’enfants ?

Pour la première fois de notre Histoire, la France abandonne des enfants français et les condamne à l’exil et à la prison. Pourtant, ces enfants sont les victimes innocentes de la guerre et de Daesh.

Le Nord-est syrien, où sont détenus ces enfants, est de nouveau en proie aux affrontements, aux offensives, aux bombardements, et à l’instabilité. Ces enfants peuvent à tout moment tomber entre les mains des forces de Bachar Al Assad ou de Daesh. Survivant dans des conditions matérielles épouvantables, manquant de soins, malnutris, sans école, ces enfants, si rien n’est fait pour les sauver, vont devoir affronter dans des tentes de fortune le froid glacial de l’hiver syrien, dans un contexte où les organisations humanitaires sont de moins en moins présentes. Certains n’y survivront pas.  

Monsieur le Président, 

Nous célébrons cette année en France et dans le monde entier le trentième anniversaire de la Convention Internationale des Droits de l’enfant, et au même moment 300 enfants français sont prisonniers dans des camps en Syrie. Comment peut-on fermer les yeux et regarder ailleurs que vers cette catastrophe humanitaire annoncée ? La mise en péril de ces enfants n’est plus l’œuvre de Daesh, mais celle de la France qui refuse obstinément de les sauver depuis plus de deux ans.

Monsieur le Président, 

Il est temps d’engager une action concrète pour sauver ces enfants, et les rapatrier en France. Il est temps de prouver que notre pays reste fidèle à ses valeurs, et que la défense des enfants et de leurs droits n’est pas un vain mot pour notre démocratie.

Le 20 novembre 2019

LE COLLECTIF DES FAMILLES UNIES


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