COMMUNIQUÉ DU 20 NOVEMBRE 2021 JOURNÉE INTERNATIONALE DES DROITS DE L’ENFANT
Le 20 novembre, la France et le monde célèbrent la Journée internationale des droits de l’enfant et commémorent l’adoption à l’unanimité par l’Assemblée Générale des Nations Unies, il y a 32 ans, de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant. En signant cette Convention, les États s’engagent à défendre l’intérêt supérieur de l’enfant et les droits fondamentaux des enfants.
Le Président de la République et toutes les instances officielles de la République Française célèbrent cette journée, en rappelant leur combat pour les droits de l’enfant en France et dans le monde, comme ils l’ont fait en 2017, 2018, 2019 et 2020. Durant toutes ces années, pourtant, des enfants français étaient parqués derrière les barbelés de camps de prisonniers dans le nord-est de la Syrie. Durant toutes ces années, dans les discours officiels prononcés chaque 20 novembre, aucune allusion à ces enfants meurtris, traumatisés, blessés, aucun mot pour leur souffrance et leur désespoir : une chape de plomb tombe sur ces enfants abandonnés, que l’on veut oublier, effacer, transformer en fantômes d’une République devenue sans humanité ni éthique.
Cette année encore, on fait comme si de rien n’était. Le Président de la République déclare le 11 novembre : « Se battre pour les droits de l’homme, c’est défendre les droits des enfants dans les conflits armés. » Jamais, sur le problème essentiel de la défense des enfants et de leurs droits, l’écart n’a été aussi profond entre les mots et les actes, entre les engagements et les déclarations de l’État français et la réalité sordide de sa politique d’abandon de 200 enfants français, maintenus dans des camps syriens dans des conditions ignobles. D’un côté, la France affirme son attachement au droit international humanitaire et prétend faire de la protection des enfants dans les conflits armés une « priorité absolue », et de l’autre elle participe à l’incarcération d’enfants français, dont la grande majorité a moins de 6 ans, elle prive des enfants de leur enfance et de leur avenir, elle bafoue tous leurs droits, et en premier lieu leur droit à la vie.
La France, depuis toutes ces années, n’a rapatrié que 35 enfants, alors que 1200 enfants ont été rapatriés de Syrie par d’autres pays depuis 2019. Elle est restée sourde aux appels au rapatriement de l’ONU, du Conseil de l’Europe, du Parlement Européen, de la Croix-Rouge, de l’UNICEF, de la Défenseure des Droits, de la CNCDH, de l’ensemble des organisations humanitaires. En 2021, alors que différents pays ont rapatrié plus de 220 enfants de Syrie, la France n’en a rapatrié que 7. Durant cette année, des pays de l’Union Européenne, l’Allemagne, la Belgique, le Danemark, la Finlande, la Suède, ont rapatrié des dizaines d’enfants et leurs mères. L’administration kurde, qui gère les camps, continue de demander aux pays étrangers de rapatrier les enfants et leurs mères.
Pour nous, grands-parents, oncles et tantes, familles des enfants français qui croupissent depuis si longtemps dans des camps de prisonniers en Syrie, cette journée du 20 novembre 2021 n’est pas une journée de célébration, c’est une journée de tristesse et de colère, car notre pays proclame son attachement aux droits de l’enfant tout en déniant ces droits à nos petits-enfants, neveux et nièces, en témoignant à leur égard d’un mépris total de l’intérêt supérieur de l’enfant. Nous ne sommes pas les seuls à nous indigner de cette situation : nombreux sont ceux qui nous soutiennent, des citoyens, des personnalités de la société civile, des artistes, des parlementaires.
Les droits de l’enfant doivent être défendus sans aucune condition, ils concernent tous les enfants sans une seule exception. Il est grand temps que notre pays respecte ses engagements en faveur des droits de l’enfant, il est grand temps que l’inhumanité, l’hypocrisie, le mensonge et la lâcheté qui ont présidé jusqu’à présent à la « doctrine » française des rapatriements au « cas par cas » cèdent le pas à une véritable politique de respect des droits de tous les enfants et de leur intérêt supérieur.
L’hiver syrien arrive, avec ses températures extrêmes, les tempêtes, la pluie, l’humidité qui s’infiltre dans ces tentes où survivent ces enfants. Les risques d’incendie augmentent. Allons-nous laisser un hiver de plus des enfants avoir froid, tomber malades, souffrir ? L’État français veut-il continuer à prendre le risque de voir des enfants mourir ?
Nous avons déjà trop attendu. Les droits de l’enfant, c’est tout de suite. Il faut rapatrier tous les enfants français détenus dans les camps de prisonniers du nord-est de la Syrie, et leurs mères.
Le 20 novembre 2021.
Le Collectif des Familles Unies
« Nous ne pourrons jamais rendre à ces enfants les années d’enfance perdues qui ont été emportées dans ces camps par les conflits, la violence, les traumatismes et le désespoir. Nous pouvons cependant commencer à planifier dès aujourd’hui comment leur donner un avenir meilleur. »
Fabrizio Carboni, directeur régional du Comité International de la Croix-Rouge pour le Proche et le Moyen-Orient.