Le Collectif des Familles Unies appelle Emmanuel Macron à commencer son second mandat « qui sera celui de la protection de l’enfance » en rapatriant tous les enfants français prisonniers en Syrie

Communiqué du Collectif des Familles Unies du 27 avril 2022

Enfants dans les camps de Roj aux nord-est de la Syrie

Emmanuel Macron vient d’être réélu pour un deuxième et dernier mandat.

Durant son premier quinquennat, de 2017 à 2022, des enfants français ont été maintenus dans des camps de prisonniers sordides, au nord-est de la Syrie. Des adultes de nationalité française, pourtant poursuivis et réclamés par la justice française, sont restés incarcérés dans une zone de non-droit, au secret, sans avocat, sans perspective de jugement et sans accès à quelque forme de justice que ce soit. Certains d’entre eux ont même été transférés illégalement en Irak, avec la complicité des autorités françaises, pour y être condamnés à mort, en violation flagrante de nos engagements internationaux. Durant le quinquennat qui vient de s’achever, la France a traité les hommes et les femmes qui avaient rejoint l’État islamique, mais également leurs enfants, en violation de ses engagements internationaux, de la Convention internationale des droits de l’enfant et de la Convention européenne des droits de l’homme. Elle a en effet délégué l’incarcération de ses ressortissants, même mineurs, à un acteur non étatique, et les a donc tous maintenus en détention arbitraire. Notre pays n’a donc pas agi en État de droit digne de ce nom.

En mai 2017, quand Emmanuel Macron accède au pouvoir, quelques enfants français seulement sont détenus avec leur mère dans les camps du Nord-Est syrien. À partir du deuxième semestre 2017 et durant l’année 2018, ce nombre va s’accroître progressivement jusqu’à représenter plus de 200 enfants en mars 2019 après la chute du dernier bastion de l’État islamique en Syrie, à Baghouz.

Au début de l’année 2019, une opération est organisée en vue de rapatrier l’ensemble de nos ressortissants avec l’aide des États-Unis, mais Emmanuel Macron l’annule au dernier moment. Depuis, c’est la doctrine indigne, dite du « cas par cas », qui s’applique, et que revendique Emmanuel Macron. Elle vise à trier des enfants, en choisissant d’en rapatrier certains, mais surtout d’abandonner le plus grand nombre dans ces Guantanamo pour enfants. Ainsi, 35 enfants ont été rapatriés depuis 2019 : des orphelins, mais aussi des enfants arrachés à leur mère et à leur fratrie restées dans le camp.

Depuis 2017, et durant tout le quinquennat qui vient de s’écouler, des enfants français ont survécu dans les camps de prisonniers Roj et Al-Hol, sans protection, sans soins appropriés, sans accès à l’éducation, sans espoir. Des enfants français ont été privés d’enfance dans des prisons à ciel ouvert. Certains ont passé des mois enfermés avec leur mère dans des cachots, sans lumière, sans hygiène, sans nourriture suffisante. Ces enfants, dont la plupart sont rentrés dans ces camps alors qu’ils n’avaient pas 6 ans, sont des victimes, reconnues comme telles par les Nations Unies, l’UNICEF ou la Croix-Rouge. Mais l’État français, lui, a fait le choix de les traiter comme des coupables, de les maintenir parqués, de laisser ces enfants blessés, malades et traumatisés derrière des barbelés durant des années. Il a même choisi d’y maintenir des orphelins, livrés à eux-mêmes depuis trois ans, d’y laisser mourir une femme, décédée faute de soins en décembre dernier en refusant obstinément son rapatriement sanitaire et de fabriquer ainsi une orpheline de 6 ans, qui n’est toujours pas rapatriée.

Les autorités françaises ont usé de tous les arguments les plus malhonnêtes et les plus mensongers possibles pour justifier cette ignominie, arguant de l’absence de relations diplomatiques, de l’extrême dangerosité des missions de rapatriement, alors même que des dizaines d’autres pays rapatriaient des centaines d’enfants et leurs mères. Emmanuel Macron, durant ces années, est resté sourd aux appels au rapatriement des familles, des Nations Unies, du Conseil de l’Europe, du Parlement européen, de l’UNICEF, de la Croix-Rouge. Il est resté sourd aux demandes de la Défenseure des droits, de la CNCDH, du coordonnateur des juges antiterroristes français, des organisations de défense des droits humains comme la LDH, la FIDH, Human Rights Watch, Amnesty. Il est resté sourd aux appels de centaines de personnalités, de parlementaires. Il est resté sourd aux appels au rapatriement de l’Administration kurde elle-même… Cette incarcération prolongée d’enfants français dans des camps est la tâche la plus honteuse sur l’histoire du quinquennat qui prend fin. Elle est une faute morale, un déni d’humanité, mais aussi et surtout une violation des droits des enfants, une violation de leur droit à la vie et un mépris glacial pour leur intérêt supérieur, comme le Comité des droits de l’enfant des Nations Unies l’a asséné en février dernier.

Emmanuel Macron vient d’être réélu Président de la République. Il a déclaré, à la fin du débat télévisé du second tour : « La protection de l’enfance sera au cœur des cinq années qui viennent. » Il a assuré, peu de temps auparavant : «Nous ferons en sorte que tous les enfants de France aient les mêmes chances. » Il est grand temps de changer de direction, et de donner à ces enfants, qui sont aussi des victimes de Daech, leur chance. Il est grand temps de leur accorder la protection que méritent tous les enfants. Il est grand temps de se conformer à nos engagements internationaux, et de respecter notamment la Convention internationale des droits de l’enfant, dont la France est signataire. 

Nous savons maintenant que le jugement des adultes sur place est impossible, et qu’il n’y aura pas de procès (et a fortiori de procès équitables) en Syrie ou en Irak (pays qui vient de réaffirmer son refus de « recevoir » et de juger des détenus étrangers), comme nous savons qu’il n’y aura pas de tribunal international sur zone. Les adultes, les mères de ces enfants, ne sont judiciarisés qu’en France, et l’intérêt supérieur des enfants, qui doit être une considération primordiale, exige qu’ils soient rapatriés avec leurs mères. La séparation dans les camps des enfants et de leur mère restée sur place, la séparation de fratries, sont des horreurs qui n’auraient jamais dû être acceptées : aucun autre pays de l’Union Européenne n’a osé aller jusque-là, aucun. La France, dans cette nouvelle étape, doit respecter les droits humains, les droits de l’enfant et le droit international : plusieurs pays européens — la Belgique, l’Allemagne, le Danemark, la Suède, la Finlande… — ont entrepris de rapatrier les enfants avec leurs mères. La France doit faire de même et cesser de s’isoler en choisissant l’inhumanité.

Le Collectif des Familles Unies appelle Emmanuel Macron à rapatrier les ressortissants français détenus en Syrie et en Irak, afin que des procès soient organisés en France, parce qu’un Président de la République ne peut continuer à se défier de notre justice. Le rapatriement des ressortissants français est la seule solution conforme à l’humanité, aux droits humains, à l’État de droit, à la justice et à la sécurité.

Le Collectif des Familles Unies appelle Emmanuel Macron à rapatrier d’urgence TOUS les enfants français et leurs mères détenus dans les camps du Nord-Est syrien.

Le 27 avril 2022
Le Collectif des Familles Unies