20 NOVEMBRE 2022 : LA FRANCE CÉLÈBRE LES DROITS DE L’ENFANT ET ABANDONNE 150 ENFANTS  FRANÇAIS DANS DES CAMPS DE PRISONNIERS EN SYRIE

Communiqué de presse du Collectif des Familles Unies

Les anniversaires et les célébrations, année après année, se succèdent : la France, comme d’autres pays, fête le 20 novembre la Journée Mondiale de l’Enfance et la Convention internationale des droits de l’enfant, adoptée en 1989 par l’Assemblée Générale des Nations Unies et ratifiée par notre pays. 

Le 20 novembre 2019, Emmanuel Macron déclare devant 400 jeunes réunis au siège de l’UNESCO, à propos de la Convention internationale des Droits de l’enfant : « Je suis pour ma part heureux et fier de notre pays qui a participé, contribué il y a 30 ans à la rédaction de ce texte, qu’il a ensuite aussitôt signé, rapidement ratifié pour le mettre en œuvre. » Et le Chef de l’Etat de marteler qu’il veut mobiliser toute la société pour en finir avec les maltraitances faites aux enfants. Au moment où le Président de la République prononce ces mots, plus de 250 enfants français croupissent déjà derrière les barbelés des camps de prisonniers Al-Hol et Roj, dans le Nord-Est de la Syrie. Certains y sont depuis 6 mois, d’autres depuis 2 ans. Après une décision de rapatriement massif annulée en 2019, tout a été fait depuis lors pour ne pas rapatrier ces enfants, et retarder toute décision conforme au droit, à nos principes et à nos engagements en matière de droits de l’enfant.

Trois ans plus tard, 150 enfants français sont toujours dans des camps de prisonniers du Nord-Est syrien, la plupart dans le camp Roj, mais certains sont encore à Al-Hol ou dans des centres de détention. La France, après avoir rapatrié 35 enfants entre 2019 et 2021, a effectué deux opérations de rapatriement en juillet et octobre (77 enfants et 32 femmes rapatriés), scellant en apparence l’abandon de la doctrine du « cas par cas » et de l’impossible jugement sur place des mères. Durant un an et demi, de janvier 2021 à juillet 2022, la France n’a procédé à aucun rapatriement : pendant ce temps, d’autres pays européens, eux, rapatriaient.  Et pendant que ces pays européens rapatriaient la quasi-totalité de leurs ressortissants détenus dans les camps, la France, qui a le plus fort contingent d’enfants détenus parmi les pays européens, trainait des pieds, gagnait du temps et résistait aux appels au rapatriement de l’Administration kurde, de l’ONU, du Conseil de l’Europe, du Parlement Européen, de l’UNICEF, de la Croix-Rouge, de la Défenseure des Droits, de la CNCDH… Il a fallu les condamnations du Comité des droits de l‘enfant des Nations Unies et de la CEDH pour que l’Etat français se décide à changer de cap et à rapatrier de façon plus importante des enfants et leurs mères.

Nous avons déjà trop attendu. Des dizaines d’enfants français ont perdu des années d’enfance dans des camps, parqués sous des tentes, subissant des températures extrêmes, manquant de soins, privés d’école, en butte à la violence et à l’insécurité, traumatisés, marqués par les deuils et le désespoir. Le psychiatre Serge Hefez a parlé à leur sujet de « maltraitance d’Etat », d’un Etat qui célèbre depuis des années les droits de l’enfant  tout en maintenant des enfants en captivité, comme pour les punir des fautes de leurs parents. 

Maintenant, il faut faire vite : ceux qui restent attendent. On ne peut pas célébrer les droits de l’enfant et prolonger le calvaire de ces enfants dans des camps sordides. On ne peut pas promouvoir la protection de l’enfance et continuer à participer à la destruction physique, psychique et sociale des enfants en les laissant languir plus longtemps dans des prisons à ciel ouvert. Il faut rapatrier sans attendre tous les enfants français de Syrie. Il faut également rapatrier toutes les mères, parce que c’est tout autant l’intérêt supérieur de ces enfants qu’ une question de justice et de sécurité : toutes ces femmes font l’objet d’un mandat d’arrêt international ou d’un mandat d’amener émis par un juge français, que la France se doit d’exécuter. 

Respecter les droits de l’enfant et la Convention internationale des droits de l’enfant, c’est ne pas laisser un seul enfant français dans un camp de prisonniers ou une prison en Syrie. 

Le 20 novembre 2022.