Communiqué de presse du « Collectif des Familles Unies »
Paris, le 16 octobre 2019
Les dernières déclarations de Jean-Yves Le Drian, Ministre des Affaires étrangères, laissent clairement entendre que les autorités françaises souhaitent négocier avec le gouvernement irakien le transfert des ressortissants français prisonniers en Syrie vers l’Irak, et leur mise en jugement devant des tribunaux irakiens ou une hypothétique « juridiction mixte » qui officierait en Irak.
Près de trois cents enfants français croupissent dans des camps syriens avec leurs mères dans des conditions épouvantables, certains depuis deux ans. La guerre les a rejoints de nouveau, avec l’offensive turque contre les Kurdes, et ils sont en danger de mort. La seule réponse que semble leur préparer M. Le Drian, au lieu de les rapatrier d’urgence en France avec leurs mères, c’est de les transférer en Irak et de les séparer de leurs mères dans des conditions atroces. Nous, grands-parents, oncles et tantes, familles de ces enfants innocents, nous ne voulons pas que ces enfants, après tant de souffrances, soient parqués à présent dans les cages des prisons irakiennes, et leurs mères jugées dans des procès inéquitables, risquant la peine de mort, la torture, le viol, les mauvais traitements.
En mai dernier, onze ressortissants français ont été condamnés à mort à Bagdad, après avoir été transférés de Syrie de manière illégale, avec l’accord probable des autorités françaises. À cette occasion, nous avons pu constater la réalité sordide de l’administration de la justice en Irak : procès expédiés en quelques dizaines de minutes, avocat commis d’office prenant connaissance du dossier au moment du procès, pas de défense véritable, délibéré de quelques minutes conduisant à des condamnations à mort. Dans tous les cas, il n’y a aucune présence de témoins, et tout est basé sur des aveux extorqués sous la torture. Rappelons qu’en Irak, le seul fait d’avoir rejoint l’État islamique, même s’il l’on n’a pas combattu, même si aucune exaction n’est retenue contre l’accusé, est passible de la peine de mort.
Les autorités françaises, si elles décident au final ces transferts et ces jugements en Irak, livreraient délibérément, en contradiction avec toutes les conventions européennes, ses ressortissants à un pays pratiquant la peine de mort, la torture, les mauvais traitements sur les prisonniers. De surcroît, les prisons irakiennes ont toujours été une pépinière du djihadisme et tous les leaders de l’État islamique ont passé à un moment ou à un autre un séjour dans ces prisons : ils ont fini par être libérés ou se sont échappé.
Le « Collectif des Familles Unies » s’oppose formellement à tout transfert et jugement en Irak des ressortissants français. La France se défie-t-elle à ce point de sa justice pour qu’elle délègue ainsi le pouvoir de juger à un système judiciaire qui ne respecte aucune des normes européennes et internationales ? La France se défie-t-elle à ce point de son système pénitentiaire qu’elle préfère envoyer des hommes, des femmes et des enfants français dans l’enfer des geôles irakiennes, où tortures, mauvais traitements et conditions de vie épouvantables sont largement documentés par les organisations humanitaires ?
La politique de « non-rapatriement » que semble continuer à défendre M. Le Drian, est irresponsable d’un point de vue sécuritaire (on délègue notre justice et on confie nos ressortissants à un état instable et corrompu qui réclame des millions de dollars par prisonnier et par an pour les juger et les emprisonner), et ignoble d’un point de vue humanitaire vis-à-vis d’enfants français innocents.
Le « Collectif des Familles Unies » réitère sa demande de rapatriement d’urgence en France des enfants français et de leurs parents. C’est la seule réponse sécuritaire et humanitaire correspondant au droit et aux valeurs républicaines.